Notre cabinet est saisi par la caution d’un couple de gérants non-salariés à la suite de l’assignation en paiement qui lui a été signifiée, pour un déficit d’inventaires (manquants de marchandises) restant impayé par les gérants.
I. EN DROIT
Le statut des gérants non-salariés a été créé par un décret-loi du 3 juillet 1944 resté en vigueur, ayant modifié une loi fondatrice du 21 mars 1941, portant création d’un statut dérogatoire pour les gérants non-salariés de maisons d’alimentations de détails à succursales multiples.
Il est codifié désormais aux articles L 7322-1 et suivants du code du travail.
La société CASINO recourt à ce statut pour l’exploitation de son réseau de superettes.
Ces gérants sont rémunérés par une commission sur les ventes et ne sont pas salariés, tout en bénéficiant par une extension légale des avantages du salariat qui ne sont pas exclus par leur statut.
Au titre des exceptions statutaire, les gérants sont personnellement responsables du stock de marchandises. Des inventaires réguliers vérifient la présence du stock théorique sur place (commandes – ventes), tout manquant devant être remboursé à la société.
Les sociétés sont en droit d’exiger une caution de cet engagement, ce que fait la société CASINO dans son réseau de superettes.
II. EN FAIT
La société a fait signer l’acte de cautionnement dans le cadre d’un premier contrat de cogérance, le contrat précisant qu’il resterait valable en cas de mutation des gérants sur d’autres magasins.
Par la suite, la société a muté plusieurs fois les gérants sur d’autres superettes, sans nouvel engagement de caution.
Le déficit est apparu uniquement sur le dernier commerce exploité.
Notre cabinet a fait valoir l’article 2292 du code civil qui dispose :
« Le cautionnement ne se présume point ; il doit être exprès, et on ne peut pas l’étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté. »
Or, la caution s’était engagée uniquement au regard du 1er contrat de cogérance, dont il ne procédait aucun déficit. Il n’était pas possible d’étendre l’engagement de la caution à d’autres commerces, pour lesquels la caution ne s’était pas expressément engagée.
La COUR D’APPEL de BESANCON nous a donné entièrement raison, en jugeant que l’engagement de cautionnement souscrit eu égard au 1er contrat de cogérance dont il ne procédait aucun déficit ,ne pouvait pas être étendu aux contrats de cogérances ultérieurs, pour lesquels la caution ne s’était pas engagée, le risque n’étant pas identique d’un magasin à l’autre
La société est déboutée, la caution mise hors de cause.
Il s’agit donc d’une décision importante dans ce statut, qui confirme le caractère nécessairement spécial et express du cautionnement, applicable au seul magasin pour lequel il a été souscrit.
Jean-Christophe BONFILS
Avocat
AVOCAT Dijon
Voyez notre rubrique DROIT DU TRAVAIL et RESPONSABILITÉS CIVILE, DROIT DES CONTRATS
En pièce jointe de cet article : CA BESANCON, 1ère chambre civile, 2 mai 2023