Lorsqu’un militaire ayant cessé son activité décède en étant titulaire d’une pension de retraite, sa veuve bénéficie normalement d’une réversion.
Toutefois, les anciens combattants d’Afrique du Nord ressortissants des anciennes colonies se voient appliquer un certain nombre de règles plus défavorables en fonction du droit en vigueur à cette époque, que pour les militaires de métropole.
Les droits à pension de la veuve s’apprécient dans ce cas en fonction du droit en vigueur au moment de la cessation d’activité du militaire (article 71 de la loi du 26 décembre 1959), y compris pour le montant de la pension qui est dérisoire vu l’ancienneté puisque les pensions des ressortissants des anciennes colonies sont « cristallisées » (figées au montant dérisoire de l’époque).
Alors que pour un ressortissant français de métropole, les droits de la veuve s’apprécie en fonction du droit en vigueur au moment du décès du militaire.
La conséquence concrète dans ce dossier était qu’à l’époque de la fin de service du militaire en question, il fallait 2 années antérieures de mariage pour ouvrir droit à l’épouse à une pension de réversion en cas de décès de son mari.
Alors que le droit actuel ne prévoit qu’une condition unique de mariage antérieur à la cessation d’activité, sans condition de durée.
Or, la veuve avait été mariée en l’espèce 18 mois avant la fin d’activité militaire de son mari, et s’était vu refuser sur ce fondement la réversion de sa pension.
Il s’agissait toutefois d’une discrimination fondée uniquement sur la nationalité proscrite par la Convention Européenne des Droits de l’Homme.
Notre Cabinet a donc saisi le Tribunal Administratif pour lui demander de déclarer ce texte non conforme à la constitution comme violant la convention internationale précitée, d’en écarter l’application et d’annuler la décision du Ministre, ainsi que d’accorder à la veuve un rappel des droits à pensions antérieures depuis le décès, dans les mêmes conditions que pour un militaire national.
Le Tribunal a fait droit à cette argumentation dans le jugement ci-joint du 22 août 2013.
Il annule la décision pour inconventionalité de la Loi précitée, dit que la veuve bénéficiera d’une pension de retraite de réversion dans les mêmes conditions qu’un national, et lui accorde un rappel de droits sur 4 années antérieure.
Il faut se féliciter que nos Tribunaux contraignent parfois l’Etat français à davantage de dignité à l’égard de nos anciens combattants d’Afrique du Nord ressortissants des anciennes colonies.
JEAN-CHRISTOPHE BONFILS
AVOCAT Dijon
Voir notre matière : Pensions militaires