Une personne qui serait chargée de la comptabilité de plusieurs sociétés aurait remis 78 chèques de ces dernières à l’ordre de diverses administrations (TRÉSOR PUBLIC, URSSAF…) sur son propre compte. La Banque les a encaissé sans s’apercevoir que le bénéficiaire n’était pas le titulaire du compte.
Un protocole a été signé entre la BANQUE et ces sociétés, au terme duquel cette banque a remboursé les sommes aux sociétés et a été subrogée conventionnellement dans leurs droits, c’est à dire qu’elle devenait titulaire de la créance de ces sociétés pour se faire rembourser auprès de l’intéressé.
L’article 1250 alinéas 1 du code civil dispose :
« Cette subrogation est conventionnelle :
1° Lorsque le créancier recevant son paiement d’une tierce personne la subroge dans ses droits, actions, privilèges ou hypothèques contre le débiteur : cette subrogation doit être expresse et faite en même temps que le paiement ; »
L’article 1251 du code civil, al. 3, prévoit par ailleurs un mécanisme distinct de subrogation légale :
« Au profit de celui qui, étant tenu avec d’autres ou pour d’autres au paiement de la dette, avait intérêt de l’acquitter ; »
Agissant sur le fondement d’une subrogation conventionnelle, subsidiairement légale, la banque a assigné l’intéressé en restitution des sommes. Celui-ci nous a chargé de sa défense.
Nous avons soulevé le fait que la subrogation conventionnelle est subordonnée au fait que la subrogation soit convenue « en même temps que le paiement », faute de quoi elle est nulle.
Ainsi, le moment du paiement de la banque est un élément constitutif de la subrogation conventionnelle sur laquelle elle fonde son action.
Or, le protocole mentionnait que le paiement serait intervenu deux mois avant sa signature, c’est à dire que le paiement ne serait pas fait « en même temps ».
Le Tribunal fait droit à notre argument et a annulé la subrogation conventionnelle ; il ne restait plus que la subrogation légale soulevée à titre subsidiaire.
Celle-ci est subordonnée au « paiement de la dette », même si le moment du paiement est indifférent.
Or, la Banque ne justifiait absolument pas du remboursement proprement dit des sociétés, mais de chèques à l’ordre de la CARPA (caisse de maniement de fonds par les Avocats), sans quittances subrogatives. Les protocoles d’accord n’emportaient pas justifications précises d’un paiement.
Le Tribunal, après avoir caractérisé la faute de la banque pour avoir encaissé des chèques à l’ordre de diverses administrations sur un autre compte, constate que la banque ne justifiait pas d’un paiement précis auprès des sociétés.
Faisant droit à notre argument, la juridiction considère qu’il manquait un élément constitutif de la subrogation légale, écartant ainsi toute forme de subrogation.
Dans ces conditions, la banque est intégralement déboutée de ses demandes.
Jean-Christophe BONFILS
AVOCAT Dijon